Interview et rencontres 19 septembre 2024

Comment se passent les JO de l’intérieur ? Lilou nous raconte


Aujourd’hui on rencontre Lilou Ressencourt, qui revient sur son expérience aux Jeux Olympiques de Paris 2024. De la préparation à la vie dans le village olympique, Lilou nous en dit plus sur sa première expérience dans une compétition de cette envergure.

Quelle a été ta préparation pour les Jeux Olympiques ?

Se préparer pour les JO, ça ne se fait pas juste l’année des Jeux, ni quelques mois avant. C’est un événement qui a lieu tous les quatre ans, donc c’est une préparation sur le long terme. Moi, je me suis entraînée pendant sept ans avec Fabrice Pellerin, mon coach. Même si on ne pensait pas tous les jours aux JO, on les préparait dès le début. Ça se concrétise vraiment dans les mois précédant l’événement, mais c’est un travail de fond : bien manger, bien dormir, sans que ce soit trop strict non plus.

L’année des Jeux, on reste dans la même dynamique qu’avant. Je m’entraînais 10 fois par semaine avec 3 séances de musculation. Sur le plan physique, ça ne changeait pas beaucoup. Par contre, j’ai commencé la préparation mentale un an et demi avant les Jeux. J’aurais peut-être dû commencer plus tôt, car c’est un événement qui peut générer beaucoup de pression et d’attentes.

Comment se passe la préparation mentale ?

C’est un peu comme un psy, mais pas exactement pareil. Au début, il apprend à te connaître, à voir où tu as besoin d’aide et ce que tu peux améliorer. Puis, au fil des séances, il débloque certaines choses. Pour moi, ça a vraiment été bénéfique, surtout que je n’avais pas l’habitude de parler de moi et de m’ouvrir. Ça te permet de grandir et de te développer, pas seulement sur le plan sportif, mais aussi sur le plan relationnel. Ça m’a vraiment aidée dans plein d’aspects.

Comment as-tu fait pour être qualifiée aux JO ?

Pour accéder aux Jeux, je devais me qualifier aux championnats de France, et déjà ça, c’était une grosse source de stress. On a donc beaucoup axé la préparation sur ça. On a tous des faiblesses ou des points à améliorer, et j’ai beaucoup travaillé avec mon préparateur mental, qui est à Saint-Laurent-du-Var, près de Nice.

Quel a été ton ressenti après le championnat de France ?

Je voulais me qualifier en individuel, mais je n’ai pas réussi. Au début, il y avait de la déception, même si j’arrive vite à surmonter l’échec. Donc la déception n’a pas duré longtemps. Le dernier jour des championnats de France, ils ont annoncé les listes des qualifiés et j’ai été prise en relais. J’ai vécu pas mal d’émotions, un peu comme des montagnes russes. Au final, c’est surtout de la fierté et du bonheur, même si je garde une petite note amère de ne pas être passée en individuel.

Dans quelle catégorie as-tu nagé aux Jeux ?

J’ai fini deuxième au 100 m aux championnats de France. En individuel, il faut non seulement être dans les deux premiers, mais aussi réaliser un certain temps de qualification. Moi, j’étais dans les deux premiers, mais je n’ai pas réussi à faire le temps.

Les relais sont choisis en fonction des meilleurs nageurs de l’équipe de France pour maximiser les résultats aux Jeux. Mais parfois, la meilleure personne est déjà engagée sur d’autres courses, donc elle peut s’aligner sur plusieurs épreuves pendant la semaine des Jeux.

Avais-tu déjà nagé avec les 3 autres personnes de ton relais ?

Ce qui est sympa, c’est qu’à un certain niveau, tu commences à connaître un peu tout le monde. On a la chance d’avoir des stages de préparation avant les grandes compétitions, donc on se rencontre et on se connaît tous au bord du bassin.

Comment se sont passés les mois avant les JO ?

La qualification pour les JO aux championnats de France a lieu mi-juin, et les Jeux sont fin juillet-début août. Après les championnats, on reprend un cycle d’entraînement pour rester en forme jusqu’aux Jeux. Côté préparation mentale, je me suis bien préparée, car il faut s’attendre à un événement qui dépasse tout ce que j’avais connu. C’était ma première équipe de France A, donc il y avait une pression supplémentaire

Découvrez en vidéo un entrainement de Lilou à Nice ici.

Quand es-tu partie à Paris et as-tu eu des entrainements sur place ?

Après les championnats de France, on est tous retournés dans nos clubs. Moi, je suis rentrée à Nice. Trois semaines plus tard, soit deux semaines avant les Jeux, on est partis en camp d’entraînement à Vichy. Il y a un super complexe là-bas avec tout ce qu’il faut pour bien s’entraîner et performer. On y est restés dix jours avec l’équipe de France, puis on est montés à Paris quatre jours avant les Jeux.

Sur place, on a continué à s’entraîner, car en natation, on ne peut pas vraiment s’arrêter. Le corps doit rester connecté avec l’eau, garder de bons appuis. Il ne faut pas que le corps se relâche et se sente en vacances.

Comment était une journée type aux JO ?

C’est une question super intéressante, mais il n’y avait pas vraiment de journée type aux JO, parce qu’il se passe tout le temps mille choses. Les horaires sont un peu particuliers, régis par la télé, donc on nageait souvent de 11h à 13h pour les séries, et de 20h à 22h pour les finales. C’est beaucoup plus tard que ce qu’on voit en championnat de France, par exemple.

Moi, j’ai nagé qu’une seule fois, donc ma semaine était assez tranquille. Le matin, je me réveillais, je déjeunais, je m’entraînais ou je récupérais, j’allais voir le kiné. Ensuite, on mangeait, on faisait une sieste, et puis on repartait à la piscine pour voir les finales et encourager les autres. Le jour où j’ai nagé, c’était pareil : réveil, piscine, échauffement, course, puis retour.

Pour ceux qui avaient plusieurs courses, c’était beaucoup plus intense : tu nageais, tu revenais, tu mangeais, tu te reposais, puis tu repartais. Le soir, il y avait parfois des contrôles antidopage, des podiums, et ça pouvait être super long.

Comment était l’ambiance dans le village olympique ?

L’ambiance est incroyable, peu importe ton niveau, que ce soit tes premiers Jeux ou tes cinquièmes. C’est toujours une expérience unique, et même ceux qui en ont déjà fait redécouvrent de nouvelles choses à chaque fois. Pour moi, c’était extraordinaire, car c’était mes premiers Jeux et ma première grosse compétition.

Tout est immense, il y a plein de choses faites pour les sportifs, et tout est gratuit. Les athlètes qu’on a l’habitude de voir à la télé, tu les croises en vrai, et ils sont super gentils.

C’est vraiment une expérience à part où pendant deux semaines, tu as l’impression que tu vis un rêve. Mais ça reste un rêve où il faut que tu sois très conscient du fait que tu dois quand même performer. Donc, tu dois rester connecté à ta réalité aussi. Mais à côté, il se passe tellement de choses et tu sais que tu vis peut-être ça qu’une fois dans ta vie.

Est-ce que tu as dormi sur les fameux lits en carton ?

Oui, on a eu les lits en carton et honnêtement, ce n’était pas le fait qu’ils soient en carton qui était un peu compliqué, c’était plus les matelas qui étaient assez durs. Donc si on aime les matelas durs, franchement les lits étaient géniaux.

Tu as pu rencontrer des athlètes (connus) ?

On est logés dans des bâtiments par pays, donc j’étais avec les Français. Tous les jours, tu croises des athlètes français, c’est super. Par exemple, rencontrer Antoine Dupont, c’était trop cool, ce n’est pas quelqu’un que tu vois souvent. Pareil pour Teddy Riner, tu te dis ‘d’habitude, je le vois à la télé, et là, je le vois en vrai’. C’est vraiment sympa.

Entre pays, ça se mélange beaucoup, surtout quand on mange. Tu peux être à côté de Néerlandais, de Hongrois, de Sénégalais, etc. Moi, j’ai déjà l’habitude avec Nice et mon club, où on fait des compétitions internationales. Donc, j’ai des amis d’autres pays et on s’est retrouvés aux Jeux. C’est aussi l’occasion de rencontrer de nouvelles personnes.

Qu’est-ce que tu as appris de cette expérience ?

J’ai appris à rester concentrée sur moi-même, parce que c’est compliqué avec une compétition aussi longue, plus d’une semaine, des horaires difficiles et plein de distractions. Il y a tellement de trucs tentants à côté, comme les repas à volonté, des services gratuits, etc. Il faut vraiment se rappeler qu’on est là pour performer et donner le meilleur de soi, surtout pour l’équipe.

J’ai aussi appris à ne pas me comparer aux autres. On a tous des niveaux et des objectifs différents. Certains sont là pour être champions olympiques, et moi, par exemple, j’étais là pour qualifier mon équipe en finale. Ce n’est pas toujours facile de se sentir légitime à côté de ceux qui ramènent des médailles, et au début, j’ai eu du mal à me sentir à ma place. Mais avec l’aide de mon préparateur mental et de mes copines, comme Mélanie Henique avec qui je partageais ma chambre, j’ai réussi à me dire que je méritais d’être là et qu’il fallait profiter de chaque instant.

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